Journal de bord : Jour 1, cerveau en ébullition

Lundi 16 mars, Paris.

Je quitte l’appartement aujourd’hui. Ce n’est pas le mien mais il était devenu mon chez moi pour quelques mois et devoir partir dans la précipitation me frustre un peu. Pourtant, depuis une semaine, depuis que tout s’est accéléré vis à vis du Coronavirus, je n’ai qu’une hâte c’est de rentrer chez moi. Je ne m’étais pas sentie comme ça depuis longtemps. J’ai même fait une crise d’angoisse. Je n’en avais pas fait depuis le lycée. Non, je mens. J’en avais fait une le 13 novembre… mais ne comparons pas l’incomparable. J’ai tout nettoyé, tout emballé, je suis prête à partir. Mon père vient me chercher et m’a demandé de ne pas aller travailler aujourd’hui. Je devais faire 12-20h mais je n’irais pas. Je les ai prévenu, ils comprennent et sont de toutes façon débordés par la situation également.
C’est un sentiment désagréable de ne pas réussir à rester terre à terre. En tout cas, pour moi c’est très difficile. Je relativise beaucoup, je suis majoritairement réaliste et pragmatique dans ma manière de pensée mais lorsqu’un évènement comme celui-ci arrive, c’est compliqué de garder le fil de sa pensée claire. C’est inédit. Surmontable, j’en suis sûre mais sans précédent. Je me rassure comme je peux avec des faits. Parce que j’adore ça, c’est intéressant et surtout ça aide mon cerveau à rester droit. Des faits, des chiffres, du concret. Il me faut du concret. Tous ce qui est de l’ordre du palpable me rassure. Contrairement à d’autres, ce n’est sûrement pas la religion qui m’aiderait ici. Pourtant, tous les jours je fais face à une actualité grave, que ce soit en France ou dans le monde, il y a des maladies, de la pauvreté, des meurtres et j’en passe.
Qu’est-ce qui me fait si peur ? Je me répète que je sais que je ne vais pas mourir, que je fais partie des personnes qui devrait s’en sortir, c’est ce qu’ils disent. Finalement, je ne sais pas. Ah ! Je ne sais pas. Donc j’ai peur. La peur de l’inconnu ? Ce n’est pas nouveau. J’imagine que c’est commun à tous. Des questions existentielles se bousculent dans ma tête. J’ai peur. J’angoisse.
Que sommes-nous en train d’affronter ? J’aime à me dire que c’est la Terre qui nous remet à notre place, qui reprends ses droits, comme avec les tsunamis et autres « catastrophes naturelles ». La religion ne fait pas partie de ma vie mais je crois bien en une force supérieure, celle de la nature. Elle est en nous aussi mais nous ne faisons rien pour s’y connecter. On se connecte à plein d’autres choses sauf à nous.
Au delà du Karma, je pense qu’en effet « everything happens for a reason ». Ici, bien que la maladie emporte beaucoup de gens, la baisse d’activité dans le monde dû au confinement a un effet positif sur l’environnement et le rappel que rien n’est acquis provoque un élan d’amour véritable mais quand je vois le comportement de certaines personnes, ça me désole. J’ai envie de croire qu’on sort grandit des ces évènements seulement je pense que certains sont beaucoup trop formater à la vie industrielle, superficielle et occidentale. Je ne juge pas car je comprends, j’ai aussi des réflexes puisque je vis dans cette société là, aussi. J’essaye d’évoluer, pour ne pas dire changer, et tenter de chercher et de m’ouvrir à d’autres choses. Bien sûr qu’aujourd’hui on ne vit pas bien sans argent ni nourriture mais ce n’est pas ma première préoccupation. Cette maladie qui nous assaillit, quelle est son but ? Pourquoi maintenant ?
Mes pensées se bousculent.
Je suis rentrée chez moi, sereine, apaisée. Loin du brouhaha parisien. Je vais m’installer de nouveau dans ma chambre et me connecter à ma famille.

À demain.

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